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5 May 2024
Beverly Priestman: Partout où elle passe, le succès la suit

Beverly Priestman: Partout où elle passe, le succès la suit

Jan 31, 2014

Beverly Priestman

Everton FC savait qu’elle était une gagnante, l’embauchant avant même qu’elle termine ses études universitaires. Un an plus tard, Beverly Priestman s’est joint à la fédération anglaise. Peu de temps après, son talent a attiré l’attention de la fédération néo-zélandaise où en 2011, après cinq ans et une série de promotions, elle est devenue directrice du programme de développement football, à l’âge de 25 ans.

En 2013, Priestman a décidé de se joindre à l’Association canadienne de soccer en quête d’un nouveau défi comme directrice du Programme d’excellence féminin (U-14/U-17). Une fois de plus, les résultats positifs ont suivi.

Au Championnat U-17 féminin de la CONCACAF, le Canada a été l’équipe du tournoi, louangée pour sa possession de ballon et son organisation à l’attaque et en défensive.

Ayant marqué 24 buts contre trois, les joueuses de Priestman ont balayé les honneurs individuels, notamment le Ballon d’Or, le Soulier d’Or et le Gant d’Or ainsi que sept places au sein du XI Étoile du tournoi.

Née à Consett, petite bourgade à 23 kilomètres de Newcastle au nord de l’Angleterre, Priestman est une accroc du travail avouée. C’est ce qu’elle appelle le prix de l’excellence.

Son prochain défi surviendra en mars quand le Canada s’envolera pour l’Amérique centrale afin de disputer la Coupe du Monde Féminine U-17 de la FIFA, Costa Rica 2014. Bien que les Canadiennes ont un groupe solide, Priestman affirme qu’il serait une erreur de se concentrer uniquement sur les résultats.

À ses yeux, il est plus important de développer des joueuses comme Sura Yekka et Jessie Fleming, qui ont déjà fait la transition vers l’équipe senior. C’est une tâche gratifiante et une des raisons pourquoi Priestman a choisi de venir au Canada.

Canada Soccer a discuté avec Priestman à son bureau de Vancouver.

De son mystérieux surnom à son parcours de joueuse, en passant par sa transition au poste d’entraîneur et sa fulgurante montée, notamment ses succès au Championnat U-17 féminin de la CONCACAF 2013 et les préparatifs pour la Coupe du Monde Féminine U-17 de la FIFA, Canada 2014.  

Canada Soccer (C.S.) : Est-il vrai que ton surnom plus jeune était « Beverly Bites Your Legs »? (trad. « Beverly-te-mord-les-jambes »)

Beverly Priestman (B.P.) : (rire) C’était « Beverly Bites Your Ankles » (trad. « Beverly-te-mord-les-chevilles »). Je ne sais pas si les gens m’ont déjà vu, mais je suis très petite. Comme seule fille au sein d’une équipe de gars à l’école, le directeur a commencé à me surnommer ainsi parce que sur les terrains j’étais une petite vite.

C.S. : Est-ce que John Herdman était ton entraîneur en tant que joueuse?

B.P. : Oui il était mon entraîneur et à l’âge de 14-15 ans j’ai commencé à m’intéresser au travail d’entraîneur en partie à cause de son enthousiasme et sa passion. Il est devenu un mentor.

Je suis devenue entraîneure parce que je savais que je n’étais pas suffisamment bonne pour jouer pour l’Angleterre; je n’avais pas de pied gauche. J’ai joué a un niveau raisonnable, mais je me suis intéressé au poste d’entraîneur et je me suis retrouvé chaque soir aux sessions de John et c’est là qu’est née ma passion pour le travail d’entraîneur.

C.S. : Est-ce que la transition de joueuse à entraîneure a été difficile?

B.P. : Non. J’ai toujours voulu être enseignante quand j’étais plus jeune, car j’avais de bons professeurs. J’étais intriguée par le fait d’apprendre et je me suis lancé comme entraîneur à un jeune âge.

C.S. : Outre John Herdman qui ont été tes autres mentors?

B.P. : Mo Marley a aussi été influente. Elle a dirigé l’équipe féminine d’Everton, une équipe avec laquelle je travaillais alors que je fréquentais l’Université John Moores de Liverpool. Elle a est maintenant l’entraîneure-chef de l’équipe féminine U-20 d’Angleterre. John et elle ont eu une énorme influence sur ma façon de voir le travail d’entraîneur.

C.S. : Revenons à ta vision du travail d’entraîneur. Tu as d’abord mentionné Everton FC et tu as travaillé pour la fédération anglaise, deux postes que tu as occupées presque immédiatement après avoir terminé tes études. Tu es clairement motivée, mais est-ce qu’il y a une autre explication à tes succès? Tout cela s’est passé très vite.

B.P. : Si je fais quelque chose, j’aime le faire au meilleur de mes capacités. Comme je l’ai dit, je suis devenu entraîneur à un jeune âge. J’ai reçu ma formation très jeune et je suis allé à l’université pour obtenir un diplôme en football. J’ai reçu l’appui d’Everton et de là la fédération anglaise. J’ai suivi John [Herdman] en Nouvelle-Zélande, parce que j’y étais déjà allé et je voulais faire partie du bon travail qui était entamé. Alors on peut dire que mes yeux étaient fixés là où je voulais aller et je savais ce que je devais faire pour m’y rendre.

C.S. : Tu es arrivée en Nouvelle-Zélande en 2009 et quatre ans plus tard, tu te retrouves directrice du développement du football, en 2012. Pourquoi es-tu venue au Canada et qu’est-ce qui t’a attiré à Canada Soccer?

B.P. : En Nouvelle-Zélande, j’ai progressé en très peu de temps, contribuant à laisser leur programme en bien meilleure posture qu’à mon arrivée. La courbe d’apprentissage était abrupte et je ne suis fait offrir de formidables opportunités, mais j’étais attirée par le Canada pour quelques raisons. Une de ces raisons était John Herdman qui est une personne unique. Il est motivé et nous partageons quelques caractéristiques.

Je savais que suivre John au Canada serait quelque chose de spécial. Je savais que le Canada présentait un potentiel énorme, simplement au chapitre du nombre de joueuses et ce qui pouvait être réalisé si le système était en place. Pour moi, c’était une occasion de travailler avec un leader solide. Puis, vous avez une Coupe du Monde Féminine de la FIFA™ au pays et une énorme base de partisans qui a suivi le parcours olympique en 2012 qui a conduit à une médaille de bronze. Le moment était parfait et j’étais une fois de plus prête à sortir de ma zone de confort.

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C.S. : D’où vient cette motivation?

B.P. : Je ne suis pas sûre. J’ai grandi dans un petit village en Angleterre où les filles ne jouaient pas tellement au football. Je crois que d’être unique m’a suivi toute ma carrière. Je veux être différente. Je veux réaliser des choses qu’une femme de 27 ans ne devrait pas pouvoir réaliser. J’imagine seulement que je vise très haut et que travaille à faire de mon mieux.

C.S. : Tu es maintenant directrice du programme d’excellence féminin du Canada pour les U-14/U-17, qu’est-ce que cela signifie?

B.P. : Il y a deux parties à mon rôle : 1) bâtir un système qui va ultimement produire plus de joueuses pour l’équipe nationale féminine pour le futur et 2) aligner les associations provinciales et territoriales pour atteindre les normes nationales. L’espoir est qu’en faisant ces choses, nous allons faire progresser les choses pour les 10 prochaines années et au-delà afin de produire plus de joueuses de façon systématique.

C.S. : Si on revient à tes premiers pas en juin 2013, de quoi as-tu hérité et qu’essaies-tu de changer?

B.P. : Plutôt que parler de ce que j’ai hérité, il faut expliquer où nous désirons amener le style de jeu canadien. Notamment vers un jeu plus axé sur la possession.

J’ai commencé lors d’une période vraiment positive avec une direction stratégique très claire. C’est fantastique de faire partie du changement qui se déroule. Par exemple, par le passé, les U-17 jouaient en équipe et avaient du succès, mais maintenant ce n’est plus qu’une question de marque finale, car la façon dont nous mesurons le succès est par le nombre de joueuses qui ont progressé dans le système.

Mon travail est de trouver le bon type de joueuse qui a le potentiel de progresser et d’utiliser les événements comme tests d’évaluation et ainsi voir comment elles se débrouillent sur la scène internationale, leur procurant une expérience.

C.S. : Au Championnat U-17 féminin de la CONCACAF 2013, le Canada s’est révélé comme l’équipe du tournoi. Le rapport technique de la CONCACAF a louangé l’équipe pour ses passes, sa possession de ballon et son organisation. Qu’as-tu pensé du tournoi et qu’est-ce qui doit être amélioré?

B.P. : J’étais très, très satisfaite du tournoi. Nous avons des statistiques qui mesurent si nos joueuses font bien les choses que nous croyons requises. Dans tous nos matchs, sauf celui contre les États-Unis, nous avons atteint nos objectifs. Même contre le Mexique en finale, les statistiques étaient positives, mais le résultat n’était pas en notre faveur. De mon point de vue, je suis très heureuse et il y a eu des moments qui me rendent très enthousiastes pour l’avenir.

C.S. : Absolument! Vous avez les U-17 qui jouent comme une version junior du club de Barcelone.

B.P. : Oui, c’était une belle progression vers un jeu orienté sur la possession, tout en conservant certains traits canadiens que nous ne voulons certainement pas perdre comme la puissance. Le vrai test sera contre les adversaires de premier plan lors de la Coupe du Monde féminine U-17 de la FIFA. John [Herdman] est un gars brillant. Il a fait beaucoup de recherche afin de s’assurer des exigences des rangs seniors et mon rôle est de mettre vie et d’inculquer ceci à nos jeunes joueuses.

C.S. : On peut donc s’attendre à plus de ce style offensif et à ce jeu de possession à la Coupe du Monde Féminine U-17, Costa Rica 2014?

B.P. : Oui, c’est certain. Comme je le disais, ce n’est pas à propos de résultats, mais du développement de joueuses et de respecter un style de jeu dans lequel nous croyons. Pour ce faire, nous devons tenter de faire des choses sur la scène mondiale, contre les meilleurs. Au Costa Rica, nous jouerons contre les meilleurs alors c’est bon.

C.S. : Toujours sur le Costa Rica, que penses-tu du groupe du Canada qui comprend le Ghana, la Corée du Nord et l’Allemagne?

B.P. : Oui, les gens l’ont étiqueté le groupe de la mort au tirage au sort. On peut le regarder de deux façons : on peut dire que la tâche sera énorme pour sortir du groupe; il y a les Allemandes, championnes d’Europe et les Nord-Coréennes qui ont toujours progressé hors de leur groupe, atteint deux fois les demi-finales et remporté un tournoi. Je regarde toutefois cela d’une autre façon en disant que ces filles ont besoin d’être testées contre les meilleures au monde. C’est une énorme expérience d’apprentissage, mais nous aimerions progresser puisque cela signifie un plus grand nombre de matchs et d’expériences à appliquer à notre système de jeu à l’avenir. Alors oui, la tâche est immense, mais de ce que j’entends et ce que je vois des capacités de ce groupe, elles ont leur chance et nous allons tenter le coup.

C.S. : La chanson officielle du tournoi s’intitule « Pasion Total ». Se trouve-t-elle sur ton iPod?

B.P. : Non, je ne l’ai jamais entendu. Je devrais probablement la télécharger.

C.S. : Nous posons la question puisque l’équipe nationale féminine écoute « The Power of Love » de Céline Dion avant ses matchs. Est-ce que les U-17 ont une tradition semblable?

B.P. : Oui, les adolescentes écoutent de la musique plus moderne, mais le personnel et moi, même si je n’ai que 27 ans, avons des goûts musicaux un peu plus anciens. Les filles ont plusieurs chansons et des danses, mais nous n’avons pas encore notre chanson.

C.S. : Comment puises-tu le maximum de tes joueuses et as-tu des conseils à donner aux autres entraîneurs?

B.P. : Mon travail comme entraîneur est d’inculquer la confiance en soi à mes joueuses. Le mantra du personnel d’entraîneur est que les filles soient confortables à être inconfortables. Cela signifie de les sortir de leur zone de confort et de faire des choses qu’elles n’ont pas fait auparavant. Alors je dois créer un environnement où il est bon d’essayer de nouvelles choses. Ce n’est pas à propos du rendement, c’est à propos de l’apprentissage. C’est à propos de créer un environnement sécuritaire, tout en transmettant suffisamment de passion et de désir pour qu’elles continuent de travailler dur.

C.S. : Êtes-vous en mesure de penser à autre chose qu’au soccer?

B.P. : Le travail est une partie importante de ma vie. Depuis que je suis arrivée au Canada, j’y passe tout mon temps et j’ai adoré chaque minute. Le football (a toujours été là pour moi) d’abord comme joueuse, et maintenant comme entraîneure. Est-ce que je peux aller quelque part et oublier le football? Je n’en suis pas certaine.

C.S. : Est-ce qu’il y a quelque chose qui t’aide à refaire tes énergies?

B.P. : J’imagine que de m’entraîner et de sortir pour manger un bon repas sont certainement deux choses qui me sortent du lit le matin, outre le fait de travailler.

C.S. : Existe-t-il quelque chose d’autre que nous pouvons faire pour nous assurer que le Canada continue de produire des joueuses de classe mondiale comme Christine Sinclair?

B.P. : Certains entraîneurs sont purement en quête de succès, même dans les rangs juniors. Ma philosophie et quelque chose que nous avons solidement implanté en Nouvelle-Zélande est qu’au lieu de poursuivre les résultats, concentrez-vous sur le processus et le développement de l’individu. Par exemple, certains entraîneurs pourraient fermer le jeu et défendre une avance de 1-0 avec 30 minutes à jouer, mais cela ne produira pas de Christine Sinclair puisque les joueuses ne garderont pas le ballon en vie. C’est à propos d’être prêt à prendre des risques et de connaître quel est votre boulot. Je crois que le travail d’un entraîneur jeunesse est de développer les joueuses et non d’obtenir des résultats.

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C.S. : Comment ce changement de mentalité a-t-il été accueilli au Canada?

B.P. : Au niveau national, c’est très, très positif. Dans les rangs élites provinciaux, les provinces ont été fantastiques. Il y a déjà du travail étincelant qui se déroule et avec ce support, je n’ai aucun doute que nous pouvons collectivement changer le jeu féminin au Canada.

C.S. : On parle d’impliquer plus de filles et de femmes à tous les niveaux du sport, comment progresse ce dossier?

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Candace Chapman

B.P. : C’est une vraie passion pour moi. Il y a beaucoup de femmes et de filles qui sont impliquées au soccer. Les statistiques de participation au Canada sont fantastiques. Ce que nous devons faire est de rendre le parcours très clair et d’avoir des modèles pour amener plus de femmes à avoir la confiance de s’impliquer. Par exemple, compter sur Candace Chapman, une légende de soccer féminin canadien, comme adjointe technique est le type de modèle dont nous avons besoin pour pousser plus de femmes à s’engager.

C.S. : Et toi, es-tu inconfortable d’être un modèle?

B.P. : Non, cela ne me rend pas inconfortable. Je suis très passionnée par mon travail. Je rencontre plusieurs femmes qui n’ont peut-être pas la confiance, mais le potentiel d’habileté. Alors si je suis un modèle qui démontre qu’un peu de confiance, de conviction et de travail acharné peut t’amener quelque part, alors je ne suis pas du tout inconfortable.

POUR DE PLUS AMPLES RENSEIGNEMENTS  SUR BEVERLY PRIESTMAN

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  • Appuyez l’équipe canadienne féminine U-17 en route vers le Costa Rica pour la Coupe du Monde Féminine U-17 de la FIFA, du 15 mars au 4 avril 2014.