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3 May 2024
Un Euro exotique et défensif

Un Euro exotique et défensif

Juin 17, 2016

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PHOTO: ©UEFA

 

samir_ghrib_-_credit_Mathieu_Belanger
collaboration spéciale: SAMIR GHRIB
twitter: @SamGhrib


Pour la première fois, l’Euro regroupe 24 équipes qui sont réparties en 6 groupes de 4. On y retrouve des équipes qu’on ne voit pas souvent comme l’Islande, l’Autriche, l’Albanie, le Pays de Galles, la Hongrie, les deux Irlandes. L’Euro commence à ressembler au Mondial avec un côté exotique. Mais sur le terrain, les résultats et les prestations n’ont rien d’exotique.

D’entrée de jeu, mes favoris dans l’ordre : La France – L’Allemagne – L’Espagne. J’ai de la difficulté à compléter ce carré d’as après les prestations mitigées des Anglais et de Belges, qui pouvaient aspirer à en faire partie. Il faudra peut-être compter sur les Italiens, de redoutables compétiteurs.

 

La France : Le courage et le pragmatisme de Deschamps

Le sélectionneur français n’a pas hésité à remplacer ses deux vedettes montantes, Antoine Griezman et surtout Paul Pogba, qui n’ont pas eu le rendement qu’on attendait d’eux. Excellent coaching de Deschamps qui a eu le courage de le faire. Le résultat lui a donné raison avec le repositionnement de Dimitri Payet en meneur de jeu, qui donne la victoire à la France avec un superbe but. Si Griezman a des circonstances atténuantes, avec une saison chargée avec l’Athlético de Madrid, ponctuée par une finale épuisante en finale de la ligue des champions le 28 mai dernier, en ce qui concerne Pogba, c’est une autre affaire. Ce dernier n’est pas facile à gérer, et Deschamps, souffle le chaud et le froid, le bâton et la carotte si vous voulez, avec lui depuis la dernière Coupe du Monde de 2014 Son ancien coach à la Juventus, Antonio Conte utilisait cette même stratégie.

On le présente comme un surdoué, mais il n’a pas encore confirmé son statut d’étoile montante avec l’équipe de France. Contre l’Albanie, Deschamps a eu le courage de le laisser sur le banc, ainsi que Griezman. Il les a remplacés et ils les a relancés, puisque Grizman a marqué le but gagnant contre l’Albanie.

 

Les Allemands : une machine

Ils jouent sans un véritable avant-centre, peuvent connaître des moments faibles, mais ils finissent toujours par gagner. Toujours présents dans le dernier carré d’as, les Champions du monde vont monter en puissance match après match. Pour reprendre la formule de Gary Linker, ancien international anglais : « le football est un jeu simple, 22 hommes courent après un ballon pendant 90 minutes, et à la fin, les allemands gagnent toujours

 

L’Espagne : revanchards

Les Espagnols ont de quoi être frustrés : les équipes qui les affrontent, les attendent très bas avec un bloc équipe très compact, avec peu d’espace. On se retrouve donc avec une domination outrageuse des Espagnols qui ont confisqué littéralement le ballon aux Tchèques. Le plan de match défensif de la République Tchèque a failli fonctionner, mais les Espagnols, à force de les assiéger, ont fini par trouver la faille, par l’intermédiaire de Piqué qui donne la victoire aux siens en fin de match. Les Espagnols veulent faire oublier leur désastreux mondial. Il faut compter sur eux.

 

L’Italie : Les Rois de la tactique

Considérée comme l’une des équipes italiennes les plus faibles de ces dernières années, même de tous les temps, l’Italie est toujours dangereuse quand elle a un statut de négligé. Elle a sa tête un sélectionneur, Antonio Conte, qui a connu du succès avec la Juventus avec le système de jeu 3-5-2, qu’il a d’ailleurs reconduit avec l’équipe nationale, avec son socle défensif Barzgali- Bonucci-Chielini. La victoire de l’Italie 2-0 contre la Belgique, pourtant favorite mais diminuée défensivement à cause de forfaits de dernière minute (ce qui a permis à Laurent Ciman de l’Impact de Montréal, de faire partie de la liste des 23, et même d’être sur le onze partant ), est méritée. Pour un entraineur, l’animation du 3-5-2 italien est riche d’enseignements au niveau tactique. Nous verrons plus tard comme se débrouillera l’Italie face un adversaire plus relevé comme l’Espagne, la France ou l’Allemagne.

 

Mon coup de cœur : l’Islande, un petit qui pense comme un grand

Une des tendances qui se dégage de cet Euro est le peu de buts marqués, et pas plus que par deux buts d’écart. Les petites nations jouent avec leurs qualités, et le seul moyen pour elles de rivaliser avec les grands de ce monde, est de bien défendre avant tout et de jouer en contre-attaque. Le Portugal de Christiano Ronaldo a goûté la médecine des Islandais, après le match nul de 1-1. D’ailleurs il n’a pas hésité à qualifier leur jeu de  » petite mentalité « . Il faut dire que Ronaldo s’est fait traiter «d’acteur talentueux» par l’entraîneur islandais …

Mais je pense que les Islandais ont plutôt une mentalité de « grands « . L’Islande est un pays de 329 000 habitants, le plus petit jamais qualifié pour un Euro, une Île. Elle compte 32 000 joueurs de soccer, comparativement à la Région de Québec avec 25 500 licenciés pour une population de 516 625 habitants. Ça fait réfléchir et c’est à méditer …

Les Islandais ont éliminé les Hollandais et fini devant la Turquie lors des matchs de qualification en vue de l’Euro 2016. Ce qui est frappant dans leur jeu, c’est cette confiance qui les habite. Certes, ils défendent bien, mais ils cherchent à attaquer avec une animation offensive avec deux attaquants dans un système de jeu en 4-4-2. Le 4-4-2 n’est pas un système réputé pour être défensif. En 10 matchs de qualifications, ils ont marqué 17 buts et encaissé seulement 6 buts.

Ils n’ont rien à perde et ils jouent de façon décomplexée. Je laisse la parole à un supporteur islandais, un peu plaisantin interviewé par le journal l’Équipe, mais qui résume très bien l’état d’esprit de l’Islande : « On ne va pas à l’Euro avec la meilleure équipe, mais on y va avec le meilleur mental. Il faut être un peu fou pour vivre ici, entouré de 30 volcans en activité. Avec notre folie, on peut le faire, sortir du groupe et aller plus loin. Pourquoi ne pas gagner ?»

 En tout cas, ils viennent de créer une surprise en faisant mat nul 1-1 contre le Portugal de Christiano Ronaldo. Nous verrons si le petit continuera de jouer comme un grand. La Grèce l’a bien fait en remportant l’épreuve en 2004 contre le Portugal, et au Portugal qui était le pays organissteur.
Samir Ghrib